COVID-19 ; “Nous sommes en guerre” ?!

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Le covid 19 aurait-il eu une vertu ? Aurait-il séparé le bon grain de l’ivraie ? Que nenni. Il n’aura que montré les différences, exacerbé les différences, montré, démontrer ce que l’homme avait de meilleur et de plus mauvais en lui.

« Nous sommes en guerre ». Fallait-il autant de pathos pour faire comprendre la situation, là où on nous disait auparavant que ce n’était qu’une grippe différente, tout au plus une grosse épidémie mais certes pas une pandémie. Mais comme chaque élément différent, cette « grippe » a démontré la différence des droits et le prima de ceux-ci : vivre.

Certains sont partis « mais ils avaient bien vécu ». N’auraient-ils pas pu vivre encore un peu, n’auraient-ils pas aimé vivre encore un peu ? Pensaient-ils qu’en plus d’être coupé des leurs proches pendant un temps, ils seraient séparés d’eux à tout jamais sans un dernier au revoir, sans une dernière caresse, sans un dernier baiser. Nous sommes latins, nous sommes volubiles, nous avons besoin de sortir, nous avons besoin de nous toucher.

Pourquoi n’avoir vraiment conscience de la dangerosité de ce virus que lorsqu’une gamine de 16 ans, 16 ANS, est partie. Était-elle plus fragile ? Était-elle différente ? N’avait-elle pas les mêmes envies de rire, d’aimer que les gamins de son âge ?

« Nous sommes en guerre ». Gouverner, c’est prévoir. J’accuse le résident de l’a-république(1) et le gouvernement de n’avoir rien prévu. J’accuse le résident de l’a-république et le gouvernement d’avoir fait passer des intérêts politiques, pour ne pas dire particuliers, avant l’intérêt national. J’accuse le résident de l’a-république et le gouvernement d’avoir en temps de guerre fait déserter un Général Médecin du front pour le planquer à l’arrière pour de basses manœuvres. J’accuse le résident de l’a-république et le gouvernement de naviguer à vue. J’accuse le résident de l’a-république et le gouvernement de piloter sans manche ou comme des manches. J’accuse le résident de l’a-république et le gouvernement de n’avoir rien prévu et donc de ne pas gouverner. Il y a des années, on a moqué Roselyne Bachelot qui avait acheté des millions de vaccins…

« Nous sommes en guerre ». N’y a-t-il pas là un peu d’indécence alors que des témoins de la Seconde Guerre sont encore en vie ? N’y a-t-il pas là un peu d’indécence alors que des témoins de l’Exode sont encore en vie ? N’y a-t-il pas là un peu d’indécence alors que des témoins des maquis sont encore en vie ? N’y a-t-il pas là un peu d’indécence alors que des témoins de la mobilisation générale sont encore en vie ? Qu’est-ce que cette drôle de guerre où on nous demande pour résister de rester chez soi devant son écran ? Qu’est-ce que cette drôle de guerre où, face au Journal d’Anne Frank, on voit fleurir des journaux de confinement, souvent de révolutionnaires de salon au chaud dans leur résidence de campagne ? Qu’est-ce que cette drôle de guerre où face aux soldats qui baissaient la tête contre les obus, on voit sortir le Français qui d’un coup est pris d’un étrange engouement aussi subit que fugace pour le footing ? Qu’est-ce que cette drôle de guerre où les coups les plus à craindre ne sont pas ceux de l’ennemi mais ceux du conjoint ?

« Nous sommes en guerre » ? Soit ! alors il faut se donner les moyens de cette guerre. Il faut entrer en économie de guerre et nationaliser si nécessaire ; c’est réquisitionner ceux qui doivent l’être et prendre les armes de cette guerre. Ces armes ce ne sont pas que des fusils d’assaut : c’est du gel hydroalcoolique, ce sont des gants et des masques, et que sais-je encore je ne suis pas médecin. C’est peut-être, si ce n’est sûrement, faire des essais thérapeutiques. Peut-être y aura-t-il des dommages collatéraux ? Mais un vrai chef de guerre n’hésite pas à envoyer des hommes au front tout en en sachant le prix s’il sait que la victoire est au bout du fusil. Le général Dwight Eisenhower a-t-il hésité sachant que 80% de la première vague d’Overlord ne reviendrait pas ? Eux même ont-ils hésité ? Non, car dans la barge étaient avec eux des chefs qui leur criaient « suivez-moi » plutôt que « en avant ». En temps de guerre, il vaut mieux être respecté que craint.

J’aimerais « faire France », j’aimerais « faire Nation » ; mais comme l’a dit l’excellente Natacha Polony dans le non moins excellent hebdomadaire Marianne « c’est la guerre, malheur à celui qui pose des questions ». « Nous sommes en guerre » alors pourquoi ne pas mettre plus à contribution notre armée qui ne demande que cela, pourquoi ne pas mettre à contribution nos soldats qui ne demandent que cela ?

Il y a un savoir-faire, il y a des talents, autant les mettre à contribution. Le Génie militaire a construit un hôpital de campagne en peu de temps. Il peut renouveler l’opération autant que nécessaire, dans chaque ville Préfecture par exemple. Les médecins militaires, les infirmiers militaires, les paramédicaux savent ce qu’est une médecine de guerre, car la guerre c’est leur cœur de métier comme on dit, alors que de cœur parfois on a bien l’impression qu’il n’en est plus.

De cœur, il n’en est plus quand on voit sur des portes, des pare-brises… des torchons naître anonymement en génération spontanée, demandant à des soignants d’aller non pas soigner ailleurs mais vivre ailleurs pour ne pas risquer d’apporter la contamination. Pauvre con ! C’est parce qu’ils prennent des risques avec d’autres que tu ne risques pas d’être contaminé. L’humain par la pandémie révèle une fois de plus sa part d’ombre comme des fils de Pétain qui seraient prêts à dénoncer, déloger avec violence si besoin le voisin d’à-côté parce qu’il est médecin, comme d’autres le faisaient parce qu’ils étaient juifs. Comment nommer ceux qui fracturent les voitures de nos infirmiers libéraux pour leur dérober masques, gants et gel ? Il n’est plus de cœur quand on voit sur des portes ou des parebrises des torchons naître anonymement en génération spontanée demandant à des personnes de bien vouloir dégager « car tout le monde sait que le virus se propage encore plus vite chez les homosexuels ». Il y a des jours où j’aimerais être médecin, homosexuel et juif…

N’y a-t-il pas indécence quand on voit que, nonobstant le travail formidable qu’ils font, des pharmaciens continuent (comme par exemple la pharmacie d’Auchan à Macon) de vendre des petites fioles de gel Hydro alcoolique à 3.20€ alors que le prix a été encadré par décret à 2.00€ pour les 50ml et 3.00€ pour les 100ml. Il y a indécence quand on voit La Poste qui, à renfort de publicité, dit qu’elle ne fera plus payer ses visites aux « seniors » parce que dire les vieux ou les anciens ce doit être un gros mot. L’indécence vient déjà d’avoir rendu ce service payant alors que le facteur par tradition et naturellement allait rencontrer les anciens, et pas que. Il y a la bêtise pour ne pas dire la connerie humaine qui n’a donc pas de limite. Elle va de ceux à qui on dit rester confiner et qui font un barbecue dans la nature. On pourrait presque lister un par un tous les péchés capitaux : « la luxure » avec ces couples prit en flagrant délit de s’ébattre à plusieurs dans la nature ; « la gourmandise » ( ?) avec ces Français qui dévalisent les rayons des supermarchés et font des stocks dignes de survivalistes ou du siège de Stalingrad ; « l’avarice » quand ils auraient la possibilité, les moyens de donner mais surtout n’en font rien « au cas où » ; « la paresse » en passant sa journée affalés sur le canapé plutôt que d’utiliser à bon escient le temps perdu ; « l’orgueil » en faisant son (pitoyable) journal de confinement en parlant de soi tout en montrant les photos de son lieu de vie (villégiature ?) à savoir une résidence secondaire de 200m² avec jardin et terrain pendant que d’autres s’entassent dans un 80m² en haut d’une tour ; « l’envie » quand on sort juste par ce qu’on en a envie…. Ces gens feraient bien de prendre le temps d’ouvrir, peut-être pour la première fois de leur vie, un livre.

J’ai la chance d’avoir eu des parents qui m’ont toujours donné les moyens de lire et une maman en particulier qui m’a donné le goût de la lecture. Beaucoup de ce que j’ai appris, je ne l’ai pas appris sur les bancs de l’école mais de par mes lectures. J’ai lu des romans, tout Zola, tout Verne, tout Asimov, et quand je dis tout c’est tout ; mais aussi des essais politiques allant de l’extrême-gauche à une certaine droite, des essais sur la Résistance, la Déportation, des essais militaires comme ceux du Général Bigeard, d’Erwan Bergot, Elie de Saint Marc.  J’étais médecin à Diên Biên Phu du Docteur Paul Grauwin quand j’étais gamin m’avait tant marqué, avec Fondation  et le Tour de la France par deux enfants qui est toujours sur ma table de chevet.

Mais imaginait-on qu’on en serait à trier les malades par manque de respirateurs ? Mais imaginait-on qu’on en serait à trier les malades par manque de lits ? Mais imaginait-on qu’on en serait à trier les malades par manque de soignants ? Imaginait-on qu’à force de tout privatiser, nous serions privés de tout et même du droit de vivre, du droit constitutionnel d’aller et venir ?

« Nous sommes en guerre ». Alors pourquoi ne pas plus utiliser l’armée dans la rue pour le maintien du confinement ? Le résident de l’a-république et le gouvernement ont montré, en prenant en peu de temps plus d’ordonnances que quiconque, qu’ils auraient pu donner à l’armée les moyens légaux et républicains, de façon temporaire, d’agir. Mais « ils » veulent sans vraiment vouloir ; et à force de tergiversations, comme il y a des années alors qu’on aurait pu résister dans la Somme, on ne se donne pas les moyens et c’est bientôt Paris qui est pris. Au temps d’une guerre Paris bruissait des bottes allemandes ; aujourd’hui Paris bruit du silence et du chant des oiseaux qui ont repris leurs droits.

S’il faut faire « France » aujourd’hui, viendra l’heure des comptes. On ne pourra se contenter de meugler « Macron démission » sur un rond-point, il faudra pointer les manques et faire des propositions. Ce sera le jour d’après. Le jour où la vie reprendra son cours comme avant. Pourrait-il être un jour comme avant ? J’ai bien peur hélas que oui. On oubliera bien vite demain ceux qu’on vénère aujourd’hui, les soignants, comme on a aimé les forces de l’ordre au lendemain des attentats et qu’on leur a craché dessus le surlendemain. Aujourd’hui, on voit une héroïne en cette hôtesse de caisse de supermarché, supermarchés qui ne se sont jamais autant gavés, quand demain on dira « à cette bonne femme » ou qu’ on ordonnera « à cette conne » « d’accélérer un peu le mouvement ».

« Faire France » certes, mais ne pourrait-on pas faire « la France en grand » comme le dit Jean-Pierre Chevènement et comme l’a dit aussi feu le Président Chirac. S’il lui a manqué l’occasion de rentrer dans l’histoire au cours de son deuxième mandat en ne formant pas un gouvernement de salut public doté d’un programme d’union nationale, le résident de l’a-république aura manqué son heure aussi, lui qui aura voulu abattre les frontières entre la droite et la gauche. Jean-Pierre Chevènement s’était présenté comme « l’homme de la Nation » en 2002 en voulant faire « turbuler le système ». Le seul tort qu’il aura eu au cours de cette présidentielle aurait été d’avoir eu raison avant les autres, d’avoir eu raison trop tôt pour la construction d’une République Moderne comme le disait Pierre Mendès-France. Finalement, il n’y a eu que Jean Moulin, sous les ordres du Général de Gaulle, pour réussir le tour de force de « faire France », faire front quand d’autres, comme aujourd’hui, voulaient capituler, et créer le Conseil de la Résistance, substantifique moelle de ce que la France avait de meilleur.

C’est l’occasion aussi de s’apercevoir de la futilité. Futilité des hommes, futilité des amours. Beaucoup utiliseront « la salle de jeux » et s’il y aura très certainement un baby-boom en 2021 ; on verra aussi au sortir de la crise, un nombre certain de divorces et de séparations. De ces couples qui n’auront pas su saisir l’occasion de se parler, de se reparler, de ceux qui n’auront pas su trouver l’imagination pour jouer, s’amuser, rire ensemble ou tout simplement se supporter.

C’est l’occasion aussi de s’apercevoir de la futilité des grandes idéologies. En France, la gauche, la droites, les khmers verts sûrs de leur victoire ont refusé le report des municipales en aparté, pour ensuite venir crier au scandale au printemps venu du non-report de cette échéance électorale. « Vous dansiez et bien chantez maintenant » tandis que les karaokés résonnent dans les cages d’escaliers des tours, non pas d’ivoire mais de béton qu’ils ne connaissent que via les petites mains qui tracts au moment des échéances.

La Nation serait-elle finalement une idée neuve ? On redécouvre ses bienfaits. C’est l’occasion aussi de s’apercevoir de la futilité des grandes idéologies comme l’europe. « Le jour d’après ne ressemblera pas au jour d‘avant. Nous devons rebâtir notre souveraineté nationale » selon E. Macron. J’aurais dit « chiche » s’il n’avait rajouté « et européenne ». Cette europe stérile qui n’enfante aucune progéniture que des monstres, des normes sans âme et autres budgets d’austérité au nom d’une idéologie dont on ne sait même plus si elle est libérale, néo-libérale ou par trop jacobine, de ce jacobinisme de la Commission europénne. Elle aura montré, une fois de plus, toute son inefficacité, son inefficience, sa fragilité. Les « grands » dirigeants de cette europe adoptent tous des résolutions nationales sans rapport et sans concertation aucune avec ses voisins. Mais d’aucuns diront encore que les (mal nommés) souverainistes ont tort.  Nous avons tort de n’avoir eu de cesse de dire du mal de cette europe, de cette europe dont la faute remonte à l’idéologie de Jean Monnet, tort de vouloir construire une autre europe : cette europe du travail et non des rentiers, cette europe des travailleurs et non du capital, cette europe des nations et non celle des multinationales. Cette europe « des confinés et non des cons finis » comme le dit Jean François Khan.

Sinon comment expliquer les différences de contaminations nationales que par les différences de politique. Nous étions de ceux qui disaient qu’il fallait rapidement prendre les choses au sérieux, mais nous sommes toujours des oiseaux de mauvais augures. Et de patriotes nous sommes passés, encore une fois, pour d’affreux nationaliste quand nous réclamions des contrôles systématiques aux frontières. On a l’impression que notre pays est dirigé à vue mais également sans vision, si ce n’est à la petite semaine. Il faut savoir assoir l’autorité de l’Etat, il faut réaffirmer son autorité et ce pour le progrès en général et le progrès social en particulier. Qui disait cela ? Napoléon. Vous voyez, cela ne date pas d’aujourd’hui et pourtant, malgré les quolibets, le bonapartisme peut aussi montrer toute son actualité. Il ne s’agit aucunement de faire remonter un Empereur sur le trône de France. Le Bonapartisme, comme cela a été dit aux assisses du Bonapartisme le 1er Février 2020 au Palais du Luxembourg, s’assoit très bien, et se conçoit tout autant, dans cette monarchie constitutionnelle qu’est la Vème République.

Alors, il est des solutions, mais pas de solution miracle. Trump a beau être complétement fou et avoir une gestion de la crise à l’identique, il a su néanmoins prendre certaines mesures comme le « Defense Production Act » datant de la guerre de Corée, qui permet au gouvernement fédéral de mobiliser le secteur industriel privé pour les besoins de la sécurité du pays ; et c’est ce qu’il a fait avec Général Motors qui perdait trop de temps pour la construction et la réalisation de respirateurs.  Nous aurions aimé voir la tête de notre pays savoir prendre d’aussi énergiques mesures : à quand les réquisitions et les nationalisations d’urgence ?

« Ni dieu, ni maitre, ni nation, ni sauveur suprême »  disaient les anarchistes. Il est certain que si le résident de l’a-république n’est pas le sauveur suprême, pas plus que leader maximo français, pas plus que la blonde n’est l’Ultima Ratio, le Docteur Raoult n’est pas LA solution mais une solution. Je ne rejette pas la solution mais SA solution. Je suis très gêné aux entournures par le personnage qui me fait penser à un gourou et que la fachosphère, toujours à la recherche d’une potion magique et facile, utilise plus qu’à l’envie jusqu’à la nausée. En 1940, des yakafaukon il y en avait pléthore, on sait où on les a retrouvés par la suite.

Revenons à nos moutons. Des pays ont fait des contrôles systématiques et bien leur en a pris. Aujourd’hui leurs décomptes sont moins importants que les nôtres.

Quand viendra l’heure des comptes, chacun pourra se demander : qu’ai-je fais, comment me suis-je comporté?  Comme en d’autres temps, il y aura ceux qui ont « résisté », ceux qui auront profité et ceux qui se seront gavés. Tous ne pourront pas se regarder dans une glace. Où peut être le feront-ils, sûrs de leur bon droit, oubliant ce qu’aura été leur devoir.. Il y aura ceux qui auront combattu à l’avant, il y aura ceux qui auront combattu à l’arrière, il y aura ceux qui auront « résisté », et puis il y aura les autres.

Pour finir sur une note d’humour entendue : « Les personnes nées en 1980 ne pouvaient penser que leur quarantaine se passerait ainsi».

(1) Le résident de l’a-République (le président de la République) est une formule qui sous-entend qu’il est simplement le locataire de la fonction sans en être vraiment à la hauteur et a-republique sans république

Grégory BAUDOUIN
Délégué Sécurité et Défense pour France Bonapartiste