La mer a de tout temps joué un rôle majeur dans l’histoire de l’humanité. Déjà dans l’Antiquité, les peuples vivaient le plus souvent près des côtes, la mer favorisant le développement des échanges commerciaux. De nos jours, dans le cadre de la mondialisation, la mer se trouve au cœur de la plupart des enjeux stratégiques, économiques et environnementaux du XXIe siècle.
« L’activité des hommes se tournera de plus en plus vers la recherche de l’exploitation de la mer. Et, naturellement, les ambitions des États chercheront à la dominer pour en contrôler les ressources… » Général de Gaulle, 1969, Brest
En effet, la multiplication des échanges commerciaux, la raréfaction des ressources naturelles et les besoins colossaux en énergies exacerbent les concurrences dans un espace océanique soumis à des tensions grandissantes entre nations, rendant ces dernières de plus en plus dépendantes des ressources de la mer.
Forte des secteurs des transports, de la construction navale, des services en mer, des ressources minières, des hydrocarbures, de l’énergie et de l’agroalimentaire, l’économie maritime pèse désormais plus de 868 milliards d’euros par an et bénéficie d’un fort potentiel de croissance (exploitation profonde, ressources minérales stratégiques, énergies marines renouvelables, désalinisation, biocarburants…) ayant pour conséquences un accroissement de la présence en mer des Hommes et des nations. Mais également la territorialisation d’espaces maritimes jusqu’alors libres d’accès.
Outre les perspectives positives, l’accroissement de la présence en mer s’explique par la nécessité de gérer les risques que sont le réchauffement climatique et ses conséquences, mais également les risques de catastrophes écologiques, de trafics illicites, de criminalité, de piraterie, de pillage des ressources halieutiques, d’appropriation de zones maritimes convoitées et de blocage des routes d’approvisionnement stratégiques. Le développement de ces menaces contre l’homme ou son environnement engendre ainsi, de la part des nations, un processus croissant de sécurisation et d’augmentation des moyens militaires en mer.
En effet, les marines constituent, de plus en plus, le noyau principal des stratégies nationales de sécurité et de défense de leurs intérêts. Cette volonté d’accroissement de puissance maritime est particulièrement visible dans l’augmentation des moyens navals des pays émergents, tandis qu’à contrario, empêtrées dans des crises budgétaires, les puissances navales traditionnelles peinent à renouveler leur flotte. Ainsi, entre 2011 et 2016, le budget « naval » de la France baissera vraisemblablement de 1,2%, tandis que celui de Chine devrait augmenter de 57% et ceux du Brésil et de l’Inde de plus de 65%.
Bien que compréhensibles, au premier abord, au regard de difficultés budgétaires que traversent les puissances maritimes traditionnelles et notamment le Royaume-Uni et la France, ces coupes budgétaires s’avèrent être des erreurs stratégiques majeures révélant surtout une grave sous-estimation des réelles perspectives de croissance qu’offrent les océans pour notre économie. Pour notre économie, mais également pour le maintien de notre rang de puissance mondiale.
En effet, la France possède, grâce à ses territoires d’outre-mer (à 97%), le deuxième domaine maritime du monde et bénéficie également de capacités, de compétences et d’atouts considérables : diversité exceptionnelle de ses territoires, marine océanique importante, industrie navale compétitive, savoir-faire et maîtrise technologique en matière d’exploration et d’exploitation en haute mer.
Dès lors, aujourd’hui puissance maritime majeure, la France doit impérativement penser sa stratégie de maritimisation et mettre en œuvre les réformes nécessaires qui lui permettront de le demeurer demain.