Réforme du Code du travail

Emmanuel MACRON, alors encore candidat à l’élection présidentielle, affirmait vouloir réformer le Code du travail par ordonnances : « Je souhaite introduire dès l’été un projet de loi d’habilitation pour simplifier le droit du travail et décentraliser la négociation. Il s’agit de donner plus de place à l’accord majoritaire d’entreprise ou de branche, d’une part, d’encadrer les décisions des prud’hommes d’autres part. Le tout par ordonnances, pour procéder de manière rapide et efficace. »  

Devenu président de la République, les paroles passent donc aux actes.

Ainsi, depuis la fin du mois de mai 2017, nous assistons à la mise en place de cette promesse de campagne, sans pour autant savoir à quelle sauce les salariés seront mangés. Le 06 juin dernier, un programme de travail a été remis aux partenaires sociaux. Le texte serait, selon Matignon, volontairement flou, permettant ainsi des interprétations larges.

Flou dans les lignes, mais cependant clair dans son calendrier. Ainsi, le gouvernement souhaite « faire évoluer dès cet été [le] droit du travail, afin de prendre en compte la diversité des attentes des salariés et des besoins des entreprises. ». L’adoption du projet de loi d’habilitation en conseil des ministres est fixée au 28 juin prochain, pour une publication des ordonnances avant la fin de l’été.

Cependant des fuites quant au texte en cours de développement auraient quelque peu bouleversé la clarté des maux… heu… des mots. Ainsi, il semblerait que la volonté du gouvernement irait dans la continuité de la loi travail (El Khomri) passé l’an dernier sous le visa de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution et ayant grandement affaibli les droits des salariés. L’idée serait de donner davantage de place aux accords d’entreprise, simplifier le dialogue social et mettre en place un barème des dommages et intérêts en cas de licenciement abusifs.

Pour le premier point, l’accord d’entreprise pourrait surplomber l’accord de branche, c’est-à-dire que des modalités différentes dans l’exercice du délai de préavis, de la période d’essai, de certains congés payés, des motifs de recours au contrat à durée déterminée voire du licenciement économique pourraient donc exister entre différentes entreprises de structures différentes ou identiques actuellement déterminées et encadrées par la loi ou la jurisprudence.

Par ailleurs, le gouvernement souhaiterait une primauté de l’accord d’entreprise sur le contrat de travail, qui conduirait de facto à se dispenser de l’accord du salarié pour modifier son contrat de travail. Faux répond la ministre du Travail Muriel Pénicaud qui précise que « la branche continuera à avoir un rôle d’encadrement », la réponse est donc tout aussi floue.

Cependant, au micro d’Europe 1 ce vendredi (09 juin 2017), le Premier ministre a affirmé qu’il n’y aurait pas d’accord d’entreprise qui irait à l’encontre des textes législatifs actuels concernant le contrat à durée déterminée. Ainsi, aucun accord n’irait à l’encontre du renouvellement du C.D.D. ni de sa durée maximale.

Sur le second point, nettement plus clair (sans jeu de mots), le gouvernement souhaite une fusion des délégués du personnel, du comité d’entreprise et du CHSCT. Dans un autre temps, le gouvernement souhaiterait favoriser la discussion et la négociation dans les entreprises. Celle-ci se passerait-elle des syndicats, telle est la question sensible et ouverte à ce jour… Les 48 réunions techniques prévues y répondront-elles ?

Concernant enfin le troisième point, le gouvernement souhaite mettre en place « un barème des dommages et intérêts en cas de licenciement abusifs et des règles plus claires et modernisées ». On revient donc à ce fameux barème qui avait causé tant de troubles lors de la précédente loi travail (rappelons ici que la loi travail ne donne actuellement qu’un barème à titre indicatif). Le danger réside dans le fait que l’employeur connaitra par avance les sanctions pécuniaires qu’il risque en se débarrassant d’un salarié de manière peu conventionnelle. Ainsi, il pourra donc peser le pour et le contre d’une telle méthode et de ce fait favoriser cette voie ou pas.

Bien évidemment nous ne pouvons à l’heure actuelle se fier véritablement à aucune source tant le mystère encadrant les contours de cette réforme demeure entier. Reste cependant que les besoins des entreprises se heurtent bien trop souvent aux attentes des salariés, et c’est une gymnastique bien complexe auquel se frotte le nouveau président élu.

 

Christopher Destailleurs Délégué Régional Adjoint en Ile de France, Délégué national à la communication, Responsable du projet Justice.